Epiaeschna heros aux portes de Québec - 23 et 24 juin 2019


Dimanche le 23 juin vers midi, je reçois un appel de Guy qui me fait part d'une observation pour le moins inattendue. En effet, lors d'un inventaire de routine qui visait à confirmer la présence d'Enallagama vernale à la sablière de Pintendre à Lévis, qu'elle ne fut pas sa surprise de repérer en bordure du chemin d'accès un mâle d'Epiaeschna heros ! Hors de portée de son filet, il prit tout de même soin d'immortaliser cette découverte (voir photo ci dessous). Plus encore, il me fait comprendre qu'il y en a plus d'une sur le site.

Sur le champ je décide de me rendre sur place pour tenter ma chance afin d'observer cette majestueuse libellule. Avec un vent nord-ouest et des pointes entre 40 et 50 km/heure les aeschnes, puisqu'il y en deux ou trois, sont exactement dans la même petite clairière, décrite par Guy, à l'abri du vent. Elles volent, se nourrissent et se posent fréquemment non loin de moi. Au vol j'ai clairement identifié un mâle mais il y en a probablement deux puisque moi et Guy avons observé à quelques reprises la même inter-action entre deux individus. Cette libellule est impressionnante de part sa taille mais que dire de son envergure d'ailes. Son vol d'apparence un peu nonchalant ne lui enlève rien en rapidité d'exécution quand vient le moment d'esquiver mon filet.

Je me doutais bien qu'il pouvait s'agir d'un influx du sud ou du sud-ouest car l'espèce n'a jamais été signalée aussi près de Québec. Mais ma surprise a été encore plus grande lorsque j'ai appris qu'une autre participante de l'atlas, Roxanne Sarah-Bernard (fide Alain Mochon de l'IALQ) avait aussi notée plus d'une vingtaine de « majestueuse » dans le secteur de Blainville durant le même week-end. De toute évidence il s'agit d'un influx d'une envergure jamais observé ou signalé à ma connaissance au Québec. Je vous invite à suivre le lien qui suit pour en apprendre d'avantage sur Epiaeschna heros et son statut au Québec. Ce superbe article a été écrit par Alain Mochon et Michel Savard puis publié dans la revue Le Naturaliste Canadien en 2016.

https://www.academia.edu/24089700/L_aeschne_majestueuse_une_libellule_en_situation_pr%C3%A9c

Sans en être certain, il est possible que la présence de cette espèce en "grand nombre" au Québec soit le résultat de tempête ou de cyclone du côté américain ce printemps mais quoi qu'il en soit ce sera assurément un évènement historique.

Sur les photos qui suivent, je montre quelques détails que nous avons remarqués et qui peuvent aider à détecter l'espèce dans votre secteur.

  • Les mâles ont la pointe des ailes ambrée, un critère qui apparaît toutefois moins évident chez la femelle. 
  • Lorsque les conditions sont optimales il est possible d'observer les ailes légèrement enfumées sur les deux premiers tiers chez les deux sexes. 
  • En vol, l'abdomen paraît légèrement recourbé vers le haut donnant un aspect ondulé à celui-ci.
Ces caractéristiques, combinées avec son imposante envergure et sa grande taille, devraient vous aider à repérer cette espèce si elle est présente dans votre secteur.

Chez ce mâle remarquez le bout des ailes légèrement ambrées (23 juin)

Les ailes des deux sexes sont légèrement enfumées (23 juin)

Remarquez la posture de l'abdomen de ce mâle

Ici une femelle, on y voit bien les ailes légèrement enfumées et la posture de l'abdomen (24 juin)

Ici une mâle posé, on voit bien le bout des ailes ambrées (23 juin)


Voilà une libellule que je ne croyais pas observer de si tôt au Québec. Je serai aussi curieux de vous lire si vous observez l'Aeschne majestueuse bientôt.


Alain Côté
Peter Lane
Guy Lemelin
Maurice Raymond

Étang Burbank - Danville - 22 juin 2019


Une visite à l''étang Burbank situé dans la municipalité de Danville, dans les Cantons-de-l'Est, nous chicotais depuis un certain temps avec toutes ces observations de Williamsonia fletcheri. N'ayant observé qu'une femelle à Saint-Just-de-Bretenières il y a quelques années nous avons décidé de tenter notre chance à la recherche de mâles de cette espèce.

Arrivé sur place la journée s'annonçait belle mais les vents du nord se sont levés accompagnés de rafales à plus de quarante km/heure. Ce n'est qu'en après-midi que la température a fini par atteindre la barre des 22 celsius. Nous empruntons lentement le sentier ceinturant l'étang et de toute évidence il n'y a pas abondance de libellules. Malgré tout nous réussissons à observer quelques espèces pour un total de 16.

Voici la liste des espèces observées:

1   Calopteryx maculata
20 Coenagrion resolutum
1   Enallagma ebrium
17 Enallagma hageni
1   Enallagma vernale
1   Nehallenia irene
25 Ischnura verticalis
3   Anax
1   Cordulegaster maculata
7   Dorocordulia libera
6   Epitheca spinigera
1   Gompheaschna furcilata
3   Williamsonia fletcheri
31 Leucorrhinia intacta
1   Libellula luctuosa
4   Libellula quadrimaculata


Nous avons rarement eu l'occassion de croiser Williamsonia fletcheri lors de nos inventaires et nous en avons profité pour prendre quelques images du secteur où nous avons fait nos captures. Les Williamsonia fletcheri semblaient surgir du feuillage ou des arbres environnants pour se poser sur le gravier aux endroits réchauffés par le soleil. Nous avons capturé une femelle et deux mâles mais nous en avons aussi repéré que nous n'avons pas été en mesure de prendre au filet. La journée venteuse et les vents du nord nous ont probablement été bénéfiques faisant en sorte que plusieurs insectes ont pu quitter le milieu plus ouvert de la tourbière, et ses bordures plus exposées au vent, pour se réfugier à l'intérieur de la forêt où il faisait un peu plus chaud.


Sentier de fin gravier exposé au soleil


Milieu et habitat environnant


Milieu et habitat environnant

Cordulie bistré - Ebony boghunter - Williamsonia fletcheri femelle

Cordulie bistré - Ebony boghunter - Williamsonia fletcheri mâle

En plus d'atteindre nos objectifs en ce qui concerne Williamsonia fletcheri, nous avons aussi observé une autre très belle espèce printanière soit l'Aeschne pygmée. Les sous-bois très humides du côté sud-ouest de l'étang semble être son repère.


Aeschne pygmée - Harlequin darner - Gompheaschna furcillata - mâle


Alain Côté
Guy Lemelin


Début de saison 2019 plutôt modeste


Après un printemps tardif,  froid et mouilleux nous nous demandions bien à quoi ressemblerait nos inventaires d'odonates en 2019. Nous n'avons pas tardé à le découvrir dès nos premières sorties en constatant les faibles décomptes de certaines espèces.


Dans la région de Québec, ce qui fait consensus, c'est que nous observons  un retard d'une dizaine de jours sur les températures normales. Les insectes piqueurs ne sont pas abondants et nous dérangent peu jusqu'à présent, nous observons d'ailleurs le même indice d'abondance sur les quantités de libellules que nous recensons. Des vents froids accompagnés de niveaux d'eaux élevés et tardant à se réchauffer pourraient avoir eu un impact négatif sur quelques populations d'insectes aquatiques.

Dans le cadre de nos recensements voici tout de même quelques données;

- le 1er juin à la sablière de Pintendre

  • 10 Anax junius
  •   2 Epitheca canis
  •   3 Epitheca sp.
  •   8 Leucorrhinia intacta

- le 8 juin à l'étang des Platanes

  •   9 Amphiagrion saucium  

 -  le 8 juin à la sablière de Pintendre

  •  10 Amphiagrion saucium
  •    1 Chromagrion conditum (mâle ténéral)
  •    5 Enallagma sp.
  •    7 Anax junius
  •  13 Phanogomphus spicatus
  •  10 Phanogomphus sp.
  •    1 Cordulia shurtleffi
  •    5 Epitheca canis
  •  10 Leucorrhinia intacta
  •    4 Libellula quadrimaculata   

À titre comparatif l'an dernier en date du 3 juin 2018 nous avions noté 40 Amphiagrion saucium ainsi que 13 Nannothemis bella à l'étang des Platanes. Cette année les premières Nannothemis bella ont été recensées le 15 juin avec un total de cinq individus. Pour ce qui est de la sablière de Pintendre nous avons peu de données pour comparer avec les années antérieures mais le constat général reste le même; il y a moins de libellules jusqu'à date.

Alain Côté